CHARLES CHAYNES

Le compositeur français Charles Chaynes, né à Toulouse le 11 juillet 1925, est mort le vendredi 24 juin, à l’âge de 90 ans chez lui, à Saint-Mandé (Val-de-Marne). Musicien lettré, homme d’une grande érudition, pétri dans la détermination au service de sa vocation, mais aussi sensible, humble, discret, il partageait avec Patrick Crispini nombre de goûts esthétiques et leurs chemins se croisèrent souvent sur les routes de la création. « Charles Chaynes était un délicieux ami, avec lequel j’ai eu tellement de plaisir à partager, des heures durant, notre amour passionné de la culture méditerranéenne et des grands textes tragiques, mais aussi autour de Pétrarque, Rilke, Garcia Lorca,ou, tout simplement, le bien-vivre du Sud-Ouest ou la belle Académie toulousaine des jeux floraux »

Né le 11 juillet 1925 à Toulouse – exact contemporain de Pierre Boulez [1925-2016], le maître à penser de l’avant-garde postsérielle, avec lequel il gardera toujours une distance sereine -, Charles Chaynes est né le 11 juillet 1925 à Toulouse dans une famille de musiciens, dont le père, Iréné, violoniste, et la mère, Valentine, pianiste et organiste, enseignent au Conservatoire de la ville.

Formé au violon paternel, Charles acquiert peu à peu le savoir-faire pour interpréter les œuvres du répertoire français, accompagnement au piano par sa mère au piano. Il entre au Conservatoire de Paris en octobre 1943, dans la classe d’harmonie de Jean Gallon et celle de violon de Gabriel Bouillon, mais sent déjà poindre une vocation pour l’écriture plutôt que pour la carrière de concertiste.

Ainsi décroche-t-il en 1946 un premier prix d’harmonie en 1946 suivi, l’année suivante, d’un premier prix de fugue… ce qui le conduit à entrer dans la classe de composition de Darius Milhaud, qui demeura, toute sa vie durant, un de ses maîtres bien aimés. Sous la houlette du musicien du Groupe des Six, il se lance à l’assaut du Prix de Rome qu’il obtiendra à la quatrième tentative, en 1951, ce qui le conduit à un séjour revigorant à la Villa Medicis de 1952 à 1955. Un an après son retour d’Italie, il trouve l’occasion d’intégrer la Radiodiffusion nationale au titre de producteur à la création musicale. De la même façon que son aîné de 9 ans Henri Dutilleux [1916-2013], qui passera vingt ans de sa vie dans les studios à superviser la musique de ses pairs, Charles Chaynes entrevoit rapidement les spécificités de l’objet radiophonique et son influence bénéfique sur le répertoire et l’inspiration des compositeurs de son temps. 

« On peut, on doit concevoir une musique écrite spécialement pour la radio ou le disque », écrit-t-il, en 1969. « Ainsi, dans mes Quatre poèmes de Sappho, certains éléments ont été pensés en vue du micro, notamment des phrases murmurées par le soliste de diverses manières, autant d’effets irréalisables en concert ! ».

Passionnément investi pour la création au sein de la radio nationale, Charles Chaynes va diriger l’antenne de France Musique de 1965 à 1975, puis le service de la création musicale à Radio France, de 1975 à 1990. Désormais sa position influente et ses hautes fonctions lui font jouer un rôle de premier plan dans la vie musicale.

Il en profite pour passer de nombreuses commandes, avec un éclectisme et une indépendance de jugement salués par tous. Mais c’est à son œuvre de compositeur qu’il attache tous ses soins, à laquelle il consacre le temps libre de ses vacances et son jardin secret à l’écart de toute vie mondaine. Dans son catalogue la voix humaine tient une place prépondérante, mais aussi nombre de partitions scéniques, sans oublier les pages de musique de chambre ou avec orchestre, qui permettent de mettre en valeur le langage volontiers atonal du compositeur, mais d’abord et avant tout soucieux d’expression poétique et théâtrale. Parmi les multiples marques de reconnaissance qui lui furent témoignées durant sa vie, l’élection en 2005 à l’Académie des Beaux-arts VIII de la section V (composition musicale), reste un des grands moments significatifs.

écouter : LETTRONOME, entretien en forme d’abécédaire avec Charles Chaynes
(© Réalisation : Patrick Crispini – DUINO PROD 1992 tous droits réservés)