DANS LES SALONS DES MUSES

Olympe Pélissier – Pauline Viardot

 Spectacle présenté en collaboration avec transArtis Productions.
Dossier détaillé, castings d’artistes proposés et budget disponibles sur demande.

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Conception, livret, musique originale, mise en scène :
Patrick CRISPINI

ACTEURS, DANSEURS ET MIMES
Solistes de EUROPEAN CONCERTS ORCHESTRA
Direction musicale : PATRICK CRISPINI

Il existe trois versions de ce programme :
– 2 récitants, ensemble instrumental (de 2 à 12 musiciens) ;
– 2 récitants; orchestre symphonique (32 à 50 musiciens) ;
– 1 récitant accompagné par un fond musical sur bande sonore.

Durée : environ 1 h 50.

Le romantisme, mouvement européen qui trouve ces racines en Allemagne à la fin du XVIIIe siècle, à la faveur des élans du « Sturm und Drang »  Tempête et passion ») insufflés par Goethe et ses amis poètes et philosophes, ne connaîtra jamais de chef de file ni de mots d’ordre. Les artistes veulent avant tout privilégier l’expression des passions et la subjectivité de leur vision, avec une sensibilité régénératrice, fuyant l’hégémonie des dogmes, la rigidité des systèmes, qui place l’individu – le Moi – comme nouveau diapason des sentiments et des sensations. Dans la première moitié du XIXe siècle, la France, l’Angleterre, l’Italie, l’Espagne, la Russie mais aussi les pays scandinaves connaissent cette effervescence que Victor Hugo décrit comme « une révolution faite dans les arts qui commence par la poésie, continue dans la musique et  qui en renouvelle la peinture ». Mais c’est dans les salons, hauts lieux du romantisme, souvent tenus par de brillantes femmes d’esprit, parfois relayés par de célèbres courtisanes, que va véritablement s’épanouir l’esprit romantique.

 

Dans ces  «cénacles » – terme biblique renvoyant à la salle où Jésus se réunissait avec ses disciples – ont croise écrivains, poètes, peintres, sculpteurs, dessinateurs, artistes en devenir côtoyant figures reconnues, tous adoubés par les fortunes de la nouvelle grande bourgeoisie. Ils viennent goûter un mode de confort et de plaisir(s) dans les hôtels particuliers nouvellement aménagés, tout en échangeant librement sur leurs créations. On y discute de tout, on y ose tout, on y expérimente les délices des « paradis artificiels », comme ce club des Haschischins, dont font partie Baudelaire et Théophile Gautier.

En Allemagne, le style « Biedermeier » installe une nouvelle intimité avec l’œuvre d’art, le récital de mélodies et de Lieder prolonge les veillées de musique et de poésie. À Paris ; dans le quartier de la Nouvelle Athènes, nouvellement aménagé par les travaux du baron Haussmann, grandes cocottes et artistes célèbres font s’épanouir un nouvel art de vivre l’art…

OLYMPE PÉLISSIER
Paris, 9 mai 1799, 22 mars 1878

Olympe Pélissier (née Olympe Louise Alexandrine Descuillers à Paris le 9 mai 1799, morte le 22 mars 1878) fut une personnalité très en vue à Paris sous la Restauration, où elle tenait salon. Issue d’un milieu populaire, elle fut destinée très tôt par sa mère, comme ses sœurs, à la carrière théâtrale. L’aînée joua d’ailleurs des rôles de soubrette à la Porte Saint-Martin. Olympe, elle, fut vendue pour quarante mille francs à un jeune duc qui l’installa dans une petite maison meublée, mais tomba rapidement malade. Sa mère la revendit aussitôt à un riche Anglo-américain qui lui constitua une rente de vingt cinq mille francs.

Ayant ainsi conquis une certaine indépendance économique, elle put choisir désormais ses amants dans des cénacles plus élevés et parmi des gens de lettres. Oscillant entre le monde des salons et le demi-monde des femmes entretenues, elle avait parmi ses admirateurs Émile de Girardin, le baron Schikler et fut le modèle et l’amante du peintre Horace Vernet, pour lequel elle posa en 1830 pour une célèbre étude du personnage de Judith dans le tableau Judith et Holopherne. Femme d’affaire ambitieuse, elle commença à prêter des sommes considérables à intérêts allant jusqu’à vingt pour cent. Même Lafayette eut recours à ses bons soins pour une reconnaissance d’avances de trente mille francs. Elle confia des affaires contractées aux États-Unis à un cabinet qui gérait à grands profits des terrains achetés à New-York.

En 1830, elle devint la maîtresse d’Eugène Sue qui la présenta à Balzac, lequel en tomba éperdument amoureux. Une scène de la Peau de Chagrin, où Raphaël de Valentin se cache dans la chambre de Foedora, rappelle un souvenir que l’écrivain vécut lors de sa propre liaison avec Olympe. Il semble même que l’écrivain lui ait proposé de l’épouser, mais elle refusa.

C’est alors, à la surprise générale, au milieu de tant de soupirants qui ne cessaient de lui demander sa main, que le cygne de Pesaro fit son apparition… et emporta la mise ! Olympe, en effet, rencontra Gioacchino Rossini en 1840, au moment où celui-ci se séparait de sa première femme, la cantatrice Isabella Colbran, après une relation longue et tumultueuse. Le compositeur, auteur de plus de quarante opéras écrits en moins de vingt années, était à la tête d’une belle fortune – que des droits d’auteur bien gérés avaient fait fructifier –  et son installation dans la capitale, où il comptait vivre désormais de ses rentes, avait attisé la curiosité du Tout-Paris. S’ajoutaient son art de vivre à l’italienne et son amour immodéré pour les arts de la table qui donnaient l’occasion de soirées mémorables. Olympe, qui ressentit bien vite un sentiment de tendresse pour cet hypocondriaque faussement histrionique et qui sentait venu le moment de se constituer une vie plus stable, décida alors de prendre en main les affaires (florissantes !) du compositeur jusqu’à la mort d’Isabella. Elle l’épousa devant l’Église en secondes noces le 16 août 1846 et l’accompagna dans la villégiature de Passy, où ils organisèrent de somptueuses soirées musicales, dont portent témoignage les nombreuses pièces pour effectifs divers écrits par Rossini « à ses heures perdues », intitulées « les Péchés de ma vieillesse », où l’on trouve quelques joyaux dont la célèbre Petite Messe Solennelle (« Musique sacrée ou sacrée musique ? », selon le mot de Rossini lui-même). Cette dernière fut créée le 14 mars 1864 dans la chapelle privée de l’hôtel particulier du comte Alexis Pillet-Will, commanditaire de l’œuvre, situé rue Moncey dans le 9e arrondissement. Dans sa version originale, l’exécution de la messe requiert quatre solistes, un petit chœur mixte de 12 chanteurs, deux pianofortes et un harmonium.

Olympe, en toutes occasions et lors de ces soirées, fut hôtesse attentionnée, mettant le plus grand soin à recevoir ses invités, parfaitement à l’aise dans son nouveau rôle de bienfaitrice des arts, de muse inspiratrice. Ainsi, de courtisane, elle devint égérie des arts et continua, après la disparition de son mari, le 13 novembre 1868, à promouvoir et diffuser la musique de son époux et de continuer à tenir salon, jusqu’à sa propre mort survenue à l’âge de 78 ans. Elle fut enterrée au cimetière du Père-Lachaise, au côté de Rossini, avant que la dépouille de l’illustre compositeur soit transférée en 1887 dans la basilique Santa Croce à Florence, où il repose désormais.

PAULINE VIARDOT
Paris, 18 juillet 1821, 18 mai 1910

1837, Bruxelles : à 16 ans Pauline Garcia, fille cadette du grand ténor Manuel Garcia, créateur du rôle du comte Almaviva dans le Barbier de Séville de son ami Rossini, professeur et compositeur qui se produit sur toutes les scènes d’Europe, chante pour la première fois sur scène. Les aficionados de Maria Malibran, la célèbre diva et sœur bien-aimée de Pauline morte précocement des suites d’une chute de cheval quatre ans plus tôt, l’attendent au tournant. Chez les Garcia, l’art n’est pas seulement une profession, c’est un sacerdoce ! Sa mère, elle-même cantatrice, décide que la cadette prendra la place de l’aînée. Là voilà donc exhibée dans la robe et avec les bijoux de sa sœur morte : pourra-t-elle rivaliser avec sa sœur ?

Pauline, pourtant, n’était pas destinée à chanter. Pianiste surdouée, élève dès ses 12 ans du maître Franz Liszt, qui ne tarit pas déloge sur sa jeune protégée. Malgré un physique ingrat, cette « irrésistible laide » selon Saint-Saëns, va pourtant très vite s’imposer. Elle a le monde musical à ses pieds. Musset la chérit (mais George Sand s’interposera, conseillant à Pauline d’épouser plutôt Louis Viardot, de vingt ans son aîné).

Quelle famille ! Les Garcia sont espagnols, mais ils ont choisi Paris, capitale de l’art au XIXe siècle. Cependant, avec son ami da Ponte, le célèbre librettiste de trois chefs-d’œuvre de Mozart, Manuel a organisé la première soirée d’opéra aux États-Unis. La petite Pauline, alors âgée de quatre ans, avec son frère Manuel Junior, chanteur lui-même et futur inventeur du laryngoscope ( !), a assisté à tout cela.

Elle va ajouter une corde à son arc de mezzo-soprano adulée : elle deviendra une tragédienne capable d’arracher les larmes dans ses interprétations de Norma de Bellini ou de l’Orphée de Gluck, qu’elle réorchestrera avec Berlioz en 1859. Mais elle fatigue trop sa voix. Devenue mère de famille nombreuse (Pauline et Louis ont quatre enfants (tous deviendront musiciens), la « star » retourne à ses premières amours : avec Clara Wieck, elle joue en public, à quatre mains ou à deux pianos.

Que ce soit à Bougival ou à Baden-Baden, elle s’entourera dans ses fameux salons de tout ce qui compte en matière d’art : Gounod, Chopin, Liszt, Fauré, Delacroix, Hugo, Flaubert, Sand, Scheffer, entre autres,  sont ses familiers… mais c’est avec l’écrivain russe Ivan Tourgueniev qu’elle entretiendra « la plus belle histoire d’amour du XIXe siècle »selon Maupassant.

En 1855, elle vendra ses bijoux pour acheter le manuscrit autographe de Don Giovanni qu’elle sauvera de la disparition. 200 ans après sa naissance et un (trop) long purgatoire, il est temps de rendre sa place à cette immense artiste aux multiples talents, inspiratrice, muse et créatrice féconde, féministe avant l’heure.