Opéra présenté en collaboration avec transArtis Productions.
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voir aussi : Oreste Jannelli – Morog
PETRARCA
Opéra en 3 actes & 26 tableaux
de Patrick Crispini
Livret de Joreste (Oreste Jannelli)
& Tristan Duino
Textes additionnels :
Charles Baudelaire, Giovanni Boccaccio,
René Char, Victor Hugo, Rainer-Maria Rilke,
Antoine de Saint Exupéry & textes sacrés
créé à Venise en juillet 1980
CANTATA PETRARCA
Cantate scénique
de Patrick Crispini
Livret :
textes de Francesco Petrarca,
Giovanni Boccaccio
& textes sacrés
créé à Venise à Genève en 1981
VERSION OPÉRA
CHANTEURS SOLISTES (5)
Francesco Petrarca, baryton
Giovanni Boccaccio, baryton
Saint‑Augustin, basse
La servante / La vieille paysanne , alto
Le serviteur, ténor
CHŒUR MIXTE (24)
Silhouettes/paysans,paysannes/ noblesse/
Les politiques/les livres
DANSEURS (4)
Francesco Petrarca, danseur
Giovanni Boccaccio, danseur
Saint‑Augustin, danseur
Laura, danseuse
RÔLES PARLÉS (1)
Marionnettiste, masques, récitant
INSTRUMENTARIUM (58)
Solistes (8) : harpes (3), violoncelle (1), cor anglais (1), mandoline (1), cymbalum (1), célesta (1).
Vents (12) : flûtes (6), clarinettes (3), saxophones (3).
Cuivres (13) : trompettes (5), cors (4), trombones (3), tuba (1).
Cordes (11) : violoncelles (11).
Percussions variées (14).
VERSION CANTATE
CHANTEURS SOLISTES (5)
Francesco Petrarca, baryton
Giovanni Boccaccio, baryton
Saint‑Augustin, basse
La servante / La vieille paysanne , alto
Le serviteur, ténor
CHOEURS MIXTES (12)
Silhouettes/paysans,paysannes/ noblesse/
Les politiques/les livres
DANSEURS (2) (ad libitum)
Francesco Petrarca, danseur
Laura, danseuse
RÔLE PARLÉ (1)
Marionnettiste, masques, récitant
INSTRUMENTARIUM (30)
Solistes (8) :
harpes (3), violoncelle (1), cor anglais (1), mandoline (1),
cymbalum (1), célesta (1).
Cuivres (5) :
trompette (1), cor (1), trombones (3).
Cordes (11) : violoncelles (11).
Percussions variées (14).
Jean-Paul Delhumeau, dit Morog
Ci-contre :
MOROG : COSTUMES POUR PETRARCA
Album de dessins (inédit)
© Patrick Crispini, coll. privée
« Il faudrait des pages pour parler dans le détail de cette œuvre créée à Venise et donnée ici en création française, qui révéla particulièrement le vrai talent de compositeur de ce jeune chef suisse, qui a devant lui une brillante carrière […] Ainsi, dans la méditation extraite de son opéra-cantate PETRARCA […] Patrick Crispini trouve dans chaque phrase du texte original une équivalence qui adhère totalement à son parti-pris. Avec un matériel sonore complexe,-mais particulièrement maîtrisé, il sait laisser la musique parler d’elle-même, dans-une succession de superbe tableaux, où passent le frémissement sensible et sensuel des vers de Pétrarque. Le violoncelle et la harpe, ainsi qu’un cymbalum, y sont mis en valeur. Le texte est toujours détaillé avec soin dans cette admirable partition d’une indubitable efficacité, qui devient une réflexion désabusée, non seulement sur les illusions et la solitude du pouvoir, mais sur la vanité intellectuelle et la solitude humaine… »
in Le Figaro, avril 1981
Présentation de l’œuvre
Le spectacle épouse la forme traditionnelle d’un opéra, mais je préfèrerais plutôt parler d’une action théâtrale enluminée par la musique. Bien qu’inspiré largement par des événements de la vie du poète et particulièrement des derniers jours précédant sa mort, le 19 juillet 1374, dans sa demeure d’Arquà près de Padoue, l’ouvrage ne revendique pas une authenticité biographique. Comme dans un kaléidoscope, les fragments qui composent les 7 tableaux en 2 actes évoquent une rencontre imaginaire tardive entre Pétrarque et Boccace. Malgré leurs divergences, des liens profonds les unissaient. En 1362, après une crise dépressive, Boccace s’était retiré dans la solitude du domaine paternel de Certardo, décidé à détruire l’ensemble de ses manuscrits et à renoncer à toute velléité nouvelle d’écriture. Pétrarque l’en avait alors dissuadé, l’encourageant à réaliser pour tous, en langue vulgaire, ce qu’il n’avait su faire lui-même que pour quelques-uns en langue savante. Cette complémentarité affirmée, face à un homme qui ne pouvait que lui apparaître comme son contraire, ne témoigne-t-elle pas d’une reconnaissance plus profonde, un sceau secret en fraternité intellectuelle ? Alors que je méditais sur ce lien unissant deux artistes en apparence opposés, vint se superposer en moi la sanguine de Leonard de Vinci des Offizi à Florence, représentant de profil les silhouettes d’un vieil homme et d’un jeune homme, comme deux faces d’une même médaille.
Leonardo da Vinci, profils confrontés d’un jeune homme
et un vieil homme, sanguine, © Galerie des Offices, Florence
À cette vision s’en ajouta bientôt une autre…
Ce jour-là – nous étions à la fin de l’été – je faisais avec un groupe d’amis la visite de la maison de Pétrarque à Arquà. C’était le crépuscule : les collines qui nous entouraient avaient pris des teintes mordorées.
Lassé de la visite, je m’étais éloigné du groupe, contemplant le coucher du soleil sur le perron de l’entrée de la demeure. De l’intérieur me parvenait la voix de notre guide, une vieille femme à moitié édentée qui psalmodiait, en les chantant presque, des vers du poète… Soudain une petite fille s’approcha de moi, me prit par la main et me tendit sa poupée, qui tomba par terre. Je venais de me baisser pour la ramasser, lorsque sa mère surgit : « Laura, dit-elle, viens ici, laisse le monsieur tranquille ». Quelque chose d’étrange se passa alors : trois impressions simultanées – la musique des vers du poète dans le lointain, la petite fille nommée Laura et sa poupée, le dessin de Vinci – déclenchèrent en moi une sorte de vision fugace et bouleversante.
En un instant je vis intérieurement se dérouler mon opéra dans ses moindres détails, Laure devenant l’enjeu à la fois érotique et mystique entre les deux poètes… Peut-on expliquer ces choses ?
Toujours est-il que, pendant les mois qui suivirent, encore marqué par cette vision, je me mis au travail à Venise avec mon ami Oreste Jannelli pour établir un livret. Trois longues années de travail, de tâtonnements, d’exaltation, de découragement s’ensuivirent, n’ayant de cesse d’essayer de préserver ce moment de grâce fulgurante et de retrouver certains éléments musicaux qui m’avaient été en quelque sorte « insufflés » ce jour-là… De fréquents séjours à Fontaine-de-Vaucluse – autre lieu pétrarquien -m’aidèrent à m’imprégner de cette poésie de la clôture féconde…
Je ne suis pas sûr d’y être parvenu – c’est une quête insensée ! – mais je demeurerai toujours reconnaissant à cette journée particulière à Arquà, qui m’a conduit sur les pas d’un poète et d’un humaniste, dont l’œuvre admirable, désormais, ne me quitte plus…
Patrick Crispini, texte extrait du programme publié lors de la création à Venise en 1980
Fresques dans la maison de Pétrarque à Arquà (détails)
Un Livre-Clé : Le Secretum
C’est dans son Secretum (Mon secret) que Pétrarque (Francesco Petrarca), peut-être pour la première fois dans l’histoire de la littérature, se livre à une psychanalyse littéraire, s’invectivant lui-même pour mieux se pardonner, donnant à saint Augustin le rôle d’une sorte de praticien à l’écoute du patient, suscitant de la contradiction pour mieux féconder une recherche introspective et tenter de se donner bonne conscience devant les abîmes et angoisses existentiels. En cela, Mon secret est un livre universel. L’opéra s’inspire de ce texte fondamental et le cite abondamment. L’interaction entre les parties chantées, dansées, parlées ou mimées est conçue de telle manière que les enchaînements doivent couler de source et se fondre dans le flux dramatique. L’œuvre couvre la durée des deux dernières journées de la vie de Pétrarque, retiré dans sa maison à Arquà, dans les collines euganéennes près de Padoue.
Le Synopsis
Boccace (Giovanni Boccaccio) est venu rejoindre Pétrarque, à Arquà. La rencontre entre les deux hommes – l’un, grand diplomate et fin lettré dans son époque, enfermé dans la tour d’ivoire de son abondante bibliothèque, absorbé par le passé et les valeurs spirituelles des Antiques ; l’autre porté par une énergie vitale en résonance avec la vie quotidienne du temps – compose un dialogue entre deux tempéraments diamétralement opposés, mais portés par une admiration réciproque. L’usage de la langue latine des érudits, par Pétrarque, de la langue vulgaire par Boccace, le goût de celui-ci pour les créatures aux mœurs légères, le dégoût et l’indifférence de Pétrarque pour une sensualité définitivement réfrénée, dans le souvenir idéalisé de Laure de Sade, entrevue à Avignon dans sa jeunesse, tout devrait les séparer… À travers leur confrontation, on assiste, à la ferveur d’une attraction réciproque, au passage de témoin entre un esprit vieillissant, dégagé des combats jugés stériles, mais dont l’expérience, les amours, les ambassades, les lectures et la solitude ont enrichi une réflexion considérable, et les élans d’un artiste plus instinctif, fiévreux, souvent dépressif, tous deux apparaissant comme deux faces complémentaires d’une même médaille…
PROLOGUE
Époque contemporaine. Mimodrame. Le marionnettiste (qui ressemble à Orson Welles) a fait son entrée, cigare aux lèvres : manipulant des fils au bout desquels sont suspendues quatre formes désarticulées (danseurs), il s’emploie à leur donner vie. Peu à peu les formes prennent corps. On reconnaît alors les figures caractéristiques de Don Quichotte, de son fidèle serviteur Sancho Pança, du Chevalier des miroirs (bachelier Sansón Carrasco) et de la belle Dulcinée… Sur une nouvelle manipulation du marionnettiste, les figures bifaces se retournent sur elles-mêmes, l’une après l’autre, laissant apparaître celles de quatre nouveaux protagonistes : Pétrarque, Boccace, saint Augustin et Laure… Un nouvel intermède dansé sert de transition pour installer la première scène de l’opéra.
ACTE I – SCÈNES I-III : PREMIÈRE NUIT, 18 JUILLET 1374
Cabinet de travail jouxtant la bibliothèque, demeure de Pétrarque à Arquà. Le poète, appliqué à rédiger un ouvrage sur la comédie dans l’art, est interrompu dans sa réflexion par le passage d’un groupe de pèlerins. De la porte, restée entrebâillée, un moine en défroque (c’est une des métamorphoses du marionnettiste) lui apparaît et l’interpelle sur la vanité des connaissances. Il évoque avec une vulgarité volontaire et ironique un épisode ancien de la vie du poète : l’Ascension du Mont Ventoux avec son frère Gherardo, devenu chartreux. Pétrarque croit reconnaître la voix de son frère qui lui reproche sa lâcheté chronique, le rend responsable de sa conversion religieuse et lui annonce sa fin prochaine. Le moine évoque alors de provocantes images où l’on discerne des amours secrètes entre son ami Boccace et Laure, sa divine et mystique inspiratrice. Puis il sort de sa manche un ouvrage prétendument de Socrate et le remet au poète. Lorsque Pétrarque, intrigué, ouvre le livre, une lumière étrange envahit toute la pièce : parviennent alors les effluves d’un bal à Avignon, où des figures miment des scènes grotesques et obscènes. On entend un chœur qui célèbre les vertus de la peste noire. À la fin de la scène Pétrarque, s’effondrant dans les bras du moine, appelle ses deux fidèles serviteurs à la rescousse. Lorsque ceux-ci entrent dans la chambre, ils trouvent le poète évanoui sur sa table de travail. Le moine a disparu…
SCÈNE IV : MÉDITATION
Temps suspendu… On entend les deux serviteurs avec le chœur entonner des versets de psaumes. Une figure dansée de Laure en vierge Marie ponctue leurs commentaires désabusés sur le thème de la Vérité… Pendant la danse, le marionnettiste a introduit un nouveau personnage : il s’agit de la figure de saint Augustin, qui vient se placer derrière le poète, toujours prostré à sa table de travail. Il le secoue et l’extrait de sa torpeur. Un dialogue s’engage. Sujets : les vanités de la gloire, l’orgueil de l’intelligence, les attraits des possessions, de la richesse, de la cupidité, les vertiges de l’amour, l’édification par la souffrance, l’inéluctable achèvement par la mort… Pour saint Augustin l’amour est une chaîne, et Pétrarque ne consent pas à s’en libérer (épisodes du Secretum). Le marionnettiste, qui avait disparu, réapparaît. Reconduisant saint Augustin, il prononce à l’unisson avec ce dernier la phrase « l’homme est une caverne qui résonne du silence de Dieu », que reprend un chœur invisible dans le lointain.
ACTE II – SCÈNES V-VII : DEUXIÈME NUIT, 19 JUILLET 1374
Ce sont les coups frappés à la porte de la chambre du poète par les serviteurs qui marquent la transition entre l’atmosphère de la méditation centrale et le retour dans le décor de la première partie. Pétrarque s’est enfermé dans sa chambre et y demeure prostré. À nouveau le chant des pèlerins retentit. On frappe à la porte. C’est Boccace qui est vient d’arriver. Pétrarque s’empresse de rejoindre son visiteur. Les deux hommes s’étreignent avec émotion. Dans le dialogue qui suit, Pétrarque évoque sa jeunesse, suggérant aussi à son ami de faire en langue vulgaire ce qu’il a lui-même essayé de faire en langue savante. Exalté, Boccace se prend à évoquer sensuellement la figure de Laure, pendant que le marionnettiste, soudainement réapparu, la fait apparaître, nue, dans un jeu de miroirs équivoque. Repoussé violemment par son ami qui se voile la face, Boccace s’enfuit en courant….
DANSE DU DÉSIR
Durant la scène qui suit, Laure, toujours nue, sous l’influence du marionnettiste, accomplit une danse érotique… Peu à peu, elle se dirige vers la table de travail du poète, où celui-ci, la tête dans les mains, est demeuré prostré pendant toute la séquence. Continuant sa gestuelle frénétique, elle gravite autour de lui, l’arrachant de force à sa torpeur. Elle finit par l’enlacer. Le poète lui adresse alors un chant d’amour passionné, désespéré, implorant qu’elle lui reste pour toujours…Le marionnettiste est revenu, accompagné d’une foule bruyante. Ils portent en triomphe la couronne de laurier du Prince des poètes et la longue traîne de la toge, dont ils recouvrent, en les encerclant, les deux amants enlacés. Puis ils les entraînent vers la chambre à coucher. Mais lorsque le marionnettiste, brusquement, arrache la toge qui les recouvre encore, on voit apparaître à leur place les deux figurines de Don Quichotte et Dulcinée déjà aperçues lors du prologue. Obscurité. On entend à nouveau le chant de procession des pèlerins. Dans la pénombre, à la fin de la scène, les deux serviteurs sont entrés dans le cabinet de travail. À la lueur de leurs bougies, ils trouvent le corps inanimé de Pétrarque, renversé sur sa table de travail. Il est mort, la plume à la main, couché sur la page inachevée où il vient de tracer les derniers mots d’un texte nouveau sur l’art de la comédie… Les serviteurs, effrayés, s’enfuient précipitamment. On voit alors réapparaître le marionnettiste qui, avec un rire sarcastique, extirpe le manuscrit d’entre les mains du poète et le brandit triomphalement. Puis, dirigeant la lumière d’une des bougies vers le mur au fond de la pièce, il éclaire une fresque où l’on voit distinctement les silhouettes de Boccace et de Laure tendrement enlacés. Il s’éloigne dans la nuit. On entend un carillon dans le lointain…
MOROG : ÉTUDE DE DÉCORS MOBILES POUR PETRARCA
© Patrick Crispini, coll. privée
PATRICK CRISPINI : ÉTUDE DE DÉCORS POUR PETRARCA
© Patrick Crispini, coll. privée