RILKE : L’ANGE ET LA ROSE

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Un voyage à travers les âges de la vie
et les quatre éléments
à partir de l’œuvre de

Conception, livret, musique originale, mise en scène :
Patrick CRISPINI

ACTEURS, DANSEURS ET MIMES
Solistes de EUROPEAN CONCERTS ORCHESTRA
Direction musicale : PATRICK CRISPINI

À travers quatre âges d’une vie humaine – l’être né, l’être adulte, l’être mûr, l’être achevé – et les quatre éléments associés à cette trajectoire – eau·terre·feu·air -, composé exclusivement de textes en français et en allemand, puisés dans l’ensemble de l’œuvre du poète Rainer-Maria Rilke, le spectacle conçu par le chef d’orchestre Patrick Crispini, enluminé par un climat sonore et musical imaginé par l’auteur, fait revivre sous une forme inédite une trajectoire unique au cœur de l’homme.

Le spectacle est présenté en langues originales (bilingue français allemand), version française ou italienne (traductions originales).

La production existe en 3 versions différentes :

  • version scénique pour 3 comédiens, groupe de danseurs, orchestre symphonique, lumières, costumes, et scénographie originaux (durée : 2h. environ) ;
  • version de chambre, pour 2 récitants, 4 musiciens et bande sonore (durée : 1h. 40 environ) ;
  • version récital pour 1 récitant et bande sonore (durée : 1h. 20 environ).

spectacle créé le 19 septembre 2002
au Grand Chalet Balthus de Rossinière (Suisse)

d’après Lettres à un Jeune Peintre et des poèmes & textes de

Spectacle & livret conçus par Patrick Crispini
à l’invitation de Madame la Comtesse
Setsuko Klossowska de Rola-Balthus et la Fondation Balthus
Irène Jacob & Jérôme Kircher, récitants
Lionel Bringuier, violoncelle & Nicolas Bringuier, piano
Marcel Karlen, vielle à roue
et le concours de Patrick Crispini, piano et textes
Illustrations : Herveline Delhumeau

Patrick Crispini avec la comtesse Setsuko Klossowska de Rola-Balthus
au Grand Chalet de Rossinière en septembre 2002

Rainer-Maria Rilke

Né à Prague le 4 décembre 1875, mort des suites d’une leucémie le 29 décembre 1926 en Suisse, marqué par une enfance terme et désenchantée, Rainer‑Maria Rilke n’aura de cesse de reconstruire peu à peu le lieu de l’accueil, où la poésie est territoire de l’esprit. Apatride, promeneur solitaire, ayant parcouru sans cesse une Europe en pleine mutation, à la recherche d’une lignée aristocratique perdue, il va tisser d’une plume incessante des liens affectifs précieux ; mais sans ancrage, avec de multiples « muses », à travers une correspondance considérable. Auprès d’Auguste Rodin, dont il deviendra pour un temps le secrétaire, il va, peu à peu, conforter la certitude d’un art vrai né dans le travail inlassable. Du château de Duino, près de Trieste, à la vieille tour de Muzot, à Veyras au-dessus de Sierre (Valais), sa dernière résidence, il accomplit la décantation progressive des mots à la dimension d’un jardin, qu’exprime le vers énigmatique gravé selon sa volonté sur sa pierre tombale à Rarogne :

Rose, ô pure contradiction,
volupté de n’être le sommeil de personne sous tant de paupières.

La sépulture de Rainer-Maria Rilke à Raron (Rarogne-Valais)

Une page de la brochure livret opusBooks l’Ange & la Rose

extraits du press-book (PDF)

un article paru dans la revue Réel en novembre 2008 (PDF)

écouter : RILKE, L’ANGE & LA ROSE – 5 extraits du spectacle
1. Ô combien encore m’émeut cet air de Bohème…
2. Qui que tu sois le soir sors…
3. Ô Poète dis-moi que fais-tu…
4. Une rose c’est toute les roses…
5. Tous les hasards sont abolis…
© DUINO PROD 2001 – Tous droits réservés

Rilke L’Ange et la Rose, entre le jour & le rêve

Un Poème visuel- Film de Patrick Crispini

Poème visuel de Patrick Crispini à partir de l’œuvre de Rainer-Maria Rilke et de son spectacle Rilke l’Ange & la Rose
– voir : 5 extraits du film © DUINO PRODUCTIONS 2020 tous droits réservés –

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
1- Le Sublime est un départ [© PC DUINO PROD 2020]

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
2- L’EAU : L’Enfance, Prague, la Moldau [© PC DUINO PROD 2020]

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
4-  LA TERRE : Russie, Lou, Worpswerde, Paris [© PC DUINO PROD 2020]

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
6- LA TERRE : Rodin, l’Ange [© PC DUINO PROD 2020]

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
9- L’AIR : L’Amour, la Rose [© PC DUINO PROD 2020]

voir : extrait du film Rilke l’Ange & la Rose-Entre le Jour et le Rêve
10- Duino, Muzot, Rarogne [© PC DUINO PROD 2020]

Rilke entre le jour & le rêve

Vos belles roses sont venues vers moi
comme deux mains charitables et douces.

Ainsi Elisabeth Dorothée Klossowska – peintre au doux nom de Baladine, mère de Pierre et Balthazar Klossowski, dit Balthus – accueillit-elle à Genève, dans le vent vif d’octobre 1920, cet hommage de la dernière seconde de Rainer-Maria Rilke, concluant une nouvelle rencontre peu fructueuse, où le poète, selon son habitude, était demeuré ardent, mais trop distant. Ambassadrices d’un sentiment naissant entre le poète et sa muse – à laquelle, plus tard, il donnera le nom de Merline – ces fleurs rejoignaient le cœur d’une femme blessée, séparée de l’historien d’art Erich Klossowski, élevant seule ses deux enfants. Elles prolongeaient d’anciennes rencontres à Paris, où l’écrivain, lors d’une vie itinérante, avait déjà croisé le destin de cette famille, dans l’embrasement intellectuel et artistique de Montparnasse. Mais les temps avaient changé : après l’immobilisation due à la guerre, fatigué par une santé chancelante et démuni de passeport, Rilke l’apatride songeait maintenant à une installation stable, soit par un retour en Allemagne, soit en Suisse, dans les Grisons, où il lui paraissait avoir trouvé un havre de paix propice à son travail. Grâce à l’entregent de sa précieuse protectrice et admiratrice Yvonne de Wattenwyl, qui jouissait à Berne d’appuis importants, Rilke pouvait espérer trouver enfin une solution à son attente, un asile à sa quête.

C’est pourtant à la suite de l’intermède genevois, entre des conférences et d’autres conversations d’âme, que Rilke fit, si l’on peut dire, le ménage dans sa vie. Il élagua des ramifications devenues encombrantes dans sa correspondance et prit plaisir à un meilleur usage de la langue française suivant ainsi l’exemple de Merline, née à Breslau en Allemagne. Amants, ils se retrouvèrent à Beatenberg sur la montagne et, peu après, firent ensemble le voyage vers le Valais. Grâce à Baladine – qui remarqua l’annonce d’une location dans la vitrine d’un coiffeur à Sierre – ils parvinrent dans la Noble contrée à Muzot au-dessus de Sierre où, conduits par une main invisible, ils découvrirent ainsi une vieille tour médiévale qui leur sembla pouvoir devenir le lieu de l’accueil. Cette petite maison appartenait à une veuve, dénommée Cécile Raunier, avec laquelle Rilke fut incapable de s’engager dans un bail durable. Ils tentèrent un long siège d’attente à l’hôtel Bellevue, où le poète luttait contre une indécision chronique. Finalement lui vint l’idée de contacter à Berg son amie Nanny Wunderly pour lui suggérer de convaincre son cousin Werner Reinhart de prendre à son compte la location temporaire, au risque d’une sous-location, s’il advenait à Rilke de reprendre son errance…

Le 20 juillet 1921, l’affaire fut conclue, sous des conditions qui parurent au poète d’abord contraires à sa liberté, puis qui finirent par lui laisser entrevoir un aménagement propice à son inspiration. De toutes ces forces, attentive et présente, Merline contribua à rendre leur intérieur avenant : une nouvelle vie pouvait commencer. Étant lui-même dépendant, Rilke s’était employé à créer d’attractives servitudes avec ses interlocuteurs. Il prit donc à cœur de s’intéresser de près à la vie scolaire et aux dons précoces des deux fils de Baladine, fondant ainsi des bases de confiance pour la carrière d’écrivain de Pierre… et le destin de peintre du jeune Balthus. Mais la situation matérielle de la famille était difficile : les enfants étaient retournés en Allemagne et Rilke entreprit des démarches auprès de connaissances pour tenter de les aider, ce qui eut pour conséquence de ramener ensuite les enfants à Paris.

Rilke se reposant sur le sofa à Muzot, aquarelle réalisée par Baladine Klossowska dans l’après-midi du 13 octobre 1921,
sur laquelle Rilke nota ce poème :

Der Gram ist schweres Erdreich,
darin wurzelt dunkel ein seeliger Sinn,
dass er sich blühend entringe ;
wie war in dir, mein stiller Schooss, alles trotzdem namenlos :
draussen erst heissen die Dinge.
Heissen nach Zweifel und heissen nach Zeit,
aber da legen wir Seligkeit plötzlich zwischen die Namen.
Und dann tritt auch die reine Hirschkuh
und der starke Stern dazu in den befriedigten Rahmen.
(Die gleichzeitige « Innenansicht ») René.

Le chagrin est un lourd terroir où un sens heureux obscurément prend racine, afin d’en dégager sa floraison ; en toi, pourtant, mon cœur silencieux, toute chose demeurait innommée : c’est au dehors que se nomment les choses. Se nomment selon le doute, se nomment selon le temps, mais voici que soudain entre les noms nous plaçons de la béatitude. Alors s’avance la biche pure et sur elle l’étoile éclatante, dans le cadre apaisé. (La « vue intérieure » partagée) René

Compagne inspirante, aux aquarelles délicates, Merline, cependant, ne pouvait devenir pour le poète la gouvernante et l’intendante dont il avait nécessité. Le 8 novembre, après huit mois de vie commune, où Rilke manifestait toujours son refus de permanence, Baladine reprit seule la route vers l’Allemagne… Le lendemain, Rilke lui écrivit :

Muzot désormais vivra de ce cœur que tu lui as éveillé.

Quelques retrouvailles se produisirent encore, notamment pendant les vacances des enfants. C’est pendant cette période que s’installa la précieuse correspondance entre Balthus et Rilke – connue aujourd’hui sous le titre : Lettre à un Jeune Peintre -, attisée par le passage du chat mitsou dans la vie du jeune homme, à propos duquel le peintre réalisa ses premières planches et le poète, émerveillé, une préface pleine d’un enseignement prophétique. Effleurant encore, comme peut-être pour mieux le conjurer, le thème central de la dépossession et de l’immanence aux êtres et aux choses.

Trouver. Perdre. Est-ce que vous avez bien réfléchi à ce que c’est que la perte ?
Ce n’est pas tout simplement la négation de cet instant généreux qui vint combler une attente
que vous-même ne soupçonnez pas. Car entre cet instant et la perte, il y a toujours
ce qu’on appelle – assez maladroitement, j’en conviens – la possession.
Or, la perte, toute cruelle qu’elle soit, ne peut rien contre la possession, elle la termine,
si vous voulez ; elle l’affirme ; au fond ce n’est qu’une seconde acquisition,
toute intérieure cette fois et autrement intense,

écrit-il dans ce court texte émouvant.

Que des roses, sceau parfumé des secrets rilkéens, soient encore les interprètes de notre reconnaissance auprès de la Comtesse Setsuko Klossowska de Rola – dont l’amitié et la confiance lumineuses honorent notre travail et nous ont permis de présenter au public, lors d’une production du spectacle L’Ange et la Rose en Suisse romande, une toile peinte à Muzot par Balthus, un exemplaire original de Mitsou et un dessin à elle dédié par le Maître,– également auprès de sa fille Harumi, pour nous avoir autorisé à utiliser des extraits des Lettres à un Jeune Peintre pour la création du spectacle Entre le Jour et le Rêve au Grand Chalet de Rossinière, ultime résidence du peintre -, et auprès de la Fondation Balthus, qui furent nos intercesseurs dans ces miraculeux moments.

Patrick Crispini, septembre 2002

Les 3 œuvres prêtées par la comtesse Setsuko Klossowska de Rola pour l’exposition à Savièse :
Paysage de collines (Muzot), 1923
Bouquet de fleurs dédié à Setsuko, 1967
– l’édition originale de Mitsou

Affiches Originales des Productions